Accrochages: Transmitting an Abstract Feeling


 

L'article suivant est reproduit d'Accrochages, e magazine mensuel international pour les galeries d'art et les musées.

Numéro #218, Juin 2020

 

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Jean-Jacques Porret

"Transmitting an Abstract Feeling"

Far from his native Switzerland, he has lived and worked in Chicago for almost 50 years, the sculptor Jean-Jacques Porret (79) has made a place for himself in the art world, by his talent of course, but also because he was inspired by the best to find his own way. By Dominique Traversini

 

“Je suis né dans une famille où l’art occupait une place de choix. Musique, peinture, littérature faisaient partie de mon quotidien. La richesse culturelle de ce milieu a sans doute contribué à développer mon sens artistique”. S’il a eu la chance de tomber dans la marmite dès son plus jeune âge, Jean-Jacques Porret a néanmoins conduit sa carrière à l’écart des voies toute tracées, et à l’étranger, de surcroît.

“Très jeune, dit-il, j’ai commencé à tailler le bois”. Mais, pour assurer ses arrières, il effectue des études d’ingénieur. Celles-ci terminées, il décide de larguer les amarres : il part à New York pour apprendre l’anglais et se construire une nouvelle vie professionnelle. Très vite cependant, il dévie de sa route. Une série de rencontres avec des sculpteurs qui veulent bien assouvir sa quête de connaissances lui donnent envie de s’essayer à cette discipline. “Le bronze m’a séduit d’emblée : c’est une matière qui répond à la main du sculpteur, qui offre une douceur au toucher. La technique de la cire perdue m’a attiré, elle aussi, car c’est la plus exigeante. Elle est lente et comporte plusieurs étapes. Elle plonge ses racines dans l’histoire et elle n’a survécu que du fait des résultats qu’elle permet”.

Après avoir déménagé à Chicago, il visite des musées un peu partout dans le monde, absorbant tout ce qu’il peut, réussit à s’introduire dans les ateliers de plusieurs sculpteurs parmi les plus célèbres de l’époque - Pomodoro, Chillida, Etrog, Henry Moore -. Il pose des questions, regarde, apprend sur le tas au contact de ces maîtres. De retour dans son atelier, il expérimente, travaille inlassablement la matière, posant les jalons de sa future démarche artistique. Des années plus tard, il ira même, par souci de perfectionnisme, jusqu’à acheter une entreprise de granit et de marbre afin d’avoir un contrôle total sur la production de ses œuvres. Cette halle lui sert aujourd’hui encore d’atelier.

Poursuivant ses recherches, il commence à incorporer le marbre et le granit à ses bronzes, au point que ces éléments prennent une place de plus en plus importante dans son processus créatif (ses pièces les plus récentes sont là pour en témoigner). “Je travaille sans idée préconçue, suivant mon instinct, une forme en amenant une autre, jusqu’à ce que le motif soit simplement un rythme dans l’espace. Si ma démarche paraît figurative, précise-t-il, je ne vise pas pour autant une reproduction de la forme humaine : ce qui m’intéresse, c’est de transmettre un sentiment abstrait ou une idée plutôt qu’une image du réel. J’utilise des formes reconnaissables pour susciter une émotion, pour faire naître des sensations. Je me considère, en fait, comme un impressionniste”.

Libre, dans sa tête et dans son geste, Jean-Jacques Porret a été assez rapidement reconnu par la profession et le public. Parmi d’autres distinctions, il a été chargé notamment de réaliser une sculpture en bronze pour le prix de l’amitié américano-suisse et ses œuvres se retrouvent aujourd’hui dans de nombreuses collections, en Europe, au Japon et aux Etats-Unis.